Face au cycle infernal des identités meurtrières et à la désorganisation politique en RDC, Repenser le nationalisme congolais à la lumière de Lumumba

 

Face au cycle infernal des identités meurtrières et à la désorganisation politique en RDC,

Repenser le nationalisme congolais à la lumière de Lumumba

 

Emmanuel Luvu[1],  

Université Officielle de Bukavu, Bukavu, République Démocratique du Congo  

 

Résumé

Repenser, réactualiser et revitaliser le nationalisme de Lumumba face au vide du leadership politique actuel, c’est l’objet de cet article. Actuellement c’est un devoir pour notre pays de réveiller les valeurs, les mythes et les idéaux de l’héritage de Lumumba pour un nouvel imaginaire Congolais. Repenser le nationalisme de Lumumba, c’est mener un combat contre la violence, la barbarie et les guerres pour instaurer l’ordre, la justice et paix aujourd’hui en République Démocratique du Congo. Il s’agit de réinventer un nouvel homme congolais conscient de la souffrance et la misère des congolais et congolaises pour une paix heureuse. Dans ce cas, il convient d’éduquer les nouvelles générations à ce nationalisme, former des acteurs politiques actuels, l’armée, et les différentes dynamiques pour la gestion et la gouvernance de l’Etat. S’il en est ainsi, la pensée politique de Lumumba devient le ferment et boussole pouvant orienter les visions politiques, économiques et sociales de notre pays.

Mots-Clés, Cycle infernal, Nationalisme, Lumumba, ferment, boussole, RDC, FELDO

Introduction

Face aux identités meurtrières et dans la situation actuelle de désorientation et d’errance où la politique congolaise manque de boussole pour se mouvoir dans le présent et de sonder pour scruter le futur, il est utile pour les générations actuelles et futures de découvrir le nationalisme congolais en vue d’en faire le ferment capable d’enrichir leur intelligence du destin de la nation et de le repenser à nouveau frais comme chance pour le Congo. Les violences, les barbaries et les massacres qui sévissent notre pays depuis l’indépendance demeurent des signes visibles qui marquent en République Démocratique du Congo l’absence d’un leadership politique comme ce fut le cas de Lumumba, dans son combat pour la libération et l’indépendance du Congo. Devant la barbarie coloniale, Lumumba s’est montré vrai nationaliste pour redonner l’image des congolais. Son combat ne fut pas celui de chercher le pouvoir mais celui de lutter pour que l’ordre, la justice et la liberté règnent. Contre l’ombre de la dictature coloniale, Patric Emery Lumumba surgi comme la figure la plus lumineuse dans le panthéon des héros du nationalisme.

Quand il prend à contre-pied Baudouin I et Joseph Kasa-vubu pour évoquer la nation congolaise victorieuse qui a arraché l’indépendance, il refuse l’indépendance cadeau pour affirmer les vraies valeurs d’une indépendance qui s’inscrit dans l’Histoire avec ses valeurs nouvelles et ses mythes nouveaux pour l’homme congolais tourné vers le futur. L’homme congolais dont il pale, c’est l’homme appelé à construire la nation congolaise sur des valeurs dont la colonisation l’avait privé : la grandeur, la liberté, la dignité, la puissance d’être homme parmi les hommes et citoyen parmi les citoyens[2]. L’homme congolais dont il parle, c’est également l’homme, capable d’assumer de façon responsable le destin de notre pays pour l’inscrire dans le concert des nations. L’homme dont-il parle, c’est aussi l’homme congolais révolté contre la domination impérialiste animé d’esprit diabolique de prédation des ressources naturelles du pays. L’homme dont il parle aujourd’hui, c’est encore l’homme congolais conscient du danger et les menaces de balkanisation entretenus par le Rwanda et l’Ouganda et dirions-nous voulus par la communauté internationale complice du génocide oublié de la RD. Congo. L’homme dont il parle c’est enfin, l’homme-génie à « activer, à vitaliser et à faire rayonner en chaque congolaise et congolais face à nos gigantesques problèmes politiques, économiques, éducatifs, spirituels et socioculturels. Un génie capable d’inventer des logiques, des stratégies et des moyens à la hauteurs des préoccupations auxquelles le pays fait face »[3].

Malheureusement, cette haute idée de Lumumba et du nationalisme qu’elle incarne a perdu de sa ferveur et de son éclat de nos jours. La grande vision de notre destinée qu’elle fécondait au matin de notre indépendance, rien ne donne plus l’impression que la classe dirigeante et les élites économiques ou culturelles de notre pays l’aient encore dans leur être et se soucient encore de la transmettre aux générations actuelles et futures. La passion des valeurs fondamentales pour lesquelles Lumumba est mort a disparu complètement du champ de notre vie4.

C’est ce nouveau souffle que nous cherchons à insuffler aujourd’hui dans nos dirigeants, dans les générations présentes pour que Lumumba demeure notre repère politique, culturel et social. Il s’agit de revitaliser ses paroles, ses pensées et surtout son idéologie comme ferment pouvant nous permettre de faire face aux menaces dont fait face notre pays. Il s’agira d’assurer la grandeur de notre pays à partir de la mise en œuvre d’un programme d’éducation civique et patriotique afin de relever nos fronts longtemps courbés pour que monte en RD. Congo l’esprit d’un patriotisme et d’une citoyenneté comme socle de développement. Dans ce sens, il s’agit de commencer cette éducation depuis la base, c’est-à-dire enseigner à nos enfants depuis l’école primaire, l’amour de patrie en insistant sur l’histoire et la géographie du pays. Dans ce cas, on leur enseignera la géostratégie qui fait de notre pays un enfer par des guerres. Cet enfer est entretenu par le Rwanda et l’Ouganda avec la complicité de la communauté internationale. Dans ce programme, nous devons insister sur les menaces de balkanisation, de notre terre, ‘’don’’ béni de nos aïeux’’. C’est pourquoi les filières d’éducation au leadership et au développement organisationnel pour la formation des cadres de la transformation sociale d’organisateurs de communautés susceptibles d’impulser de vraies dynamiques et de fortes initiatives de développent dans la société congolaise, doivent être organisées dans nos universités.

Comme la RD. Congo n’est pas à vendre, nous avons le devoir de la protéger contre les menaces de prédation et de balkanisation. Nous avons également le devoir d’assurer sa grandeur. Sa grandeur ce sont les ressources naturelles tant convoitées par les pays voisins, la communauté internationale et les multinationales décidés à maintenir notre pays dans le cycle infernal des identités meurtrières. Le destin de la République démocratique du Congo est entre les mains de ses filles et de ses fils. Être diplômé d’université, politicien, chanteur, croyant, danseur, déiste,  mélomane…c’est  bien. Mais il faudra que l’on comprenne que, c’est seulement par le labeur que nous bâtirons un pays plus beau  qu’avant, et  honorerons  la  mémoire de  ses  dignes  fils,  tels: Kimbangu, Lumumba [4] et de Ka Mana.

                      I.          LUMUMBA, UN VERITABLE NATIONALISTE CONGOLAIS

Il y a urgence aujourd’hui de redécouvrir la richesse du nationalisme congolais face aux menaces dont fait face notre pays. Il y a également nécessité de revitaliser la pensée de Lumumba au sein de la classe politique comme ferment pouvant nous servir de boussole pour orienter les visions politiques, économique et sociales de notre pays. Actuellement, c’est un devoir pour notre pays de réveiller les valeurs, les mythes et les idéaux de l’héritage de Lumumba pour un nouvel imaginaire congolais. Ce n’est pas une question de paroles vides, c’est une question de conscience incandescente, d’action créatrice et de vigueur pour la transformation de notre société, dans tous les domaines[5]. Il s’agit pour ce faire d’entreprendre désormais des actions tournées vers les visions Lumumbiennes de faire des congolais et les congolaises des citoyens libres, capables de basculer notre pays vers son destin du cœur de l’Afrique et de la gâchette de l’Afrique dont parlait Fanon. Il s’agissait de sortir notre nation ‘’au cœur de ténèbres’’ dans lequel la colonisation voulait nous maintenir. Il s’agissait également de délivrer les congolaises et les congolais de la caverne de la mort, de la barbarie, de la misère, de la domination, de la prédation et de la soumission coloniale entretenues par la Belgique et leurs alliés impérialistes.

1. Lumumba, un taon congolais et africain

Considéré Lumumba comme un taon congolais et africain, c’est voir le rôle qu’il a joué pour l’indépendance du Congo et son impact sur d’autres pays africains dans le processus des indépendances. Dans ce sens, il était un éveilleur, un veilleur et un libérateur du Congo et des pays africains. Il ne cessait jamais de morigéner, de bousculer et de déranger les colonialistes sur leurs barbaries vis-à-vis des négrès. Il voulait dans tout son combat laisser les consciences congolaises en alertes, en éveils et surtout tirer la sonnette d’alarme sur les dangers qui pesaient sur le Congo et tout le continent si nous ne faisons pas attention. Il n’était moins qu’un philosophe, un Socrate de son temps qui, du couchant jusqu’au levant du soleil ne cessait de clamer : «Je suis le Taon qui de tout le jour, ne cesse jamais de vous réveiller, de vous conseiller et de morigéner chacun de vous. Car si vous croyez qu’en tuant les gens vous empêcherez qu’on vous reproche de vivre dans l’erreur, vous vous trompez. Une vie sans examen ne vaut pas la peine d’être vécue. N’est pas digne d’être vécue, une vie sans réflexion, sans retour sur soi, sans interrogation sur le sens et la valeur de ses actes. Or, pour vivre une telle vie, il faut en finir avec les réponses toutes faites et jamais interrogées avec cette ignorance qui s’ignore elle même »[6].

C’est ainsi que comme veilleur et éveilleur de son temps, Lumumba dans sa lettre adressée à l’administrateur-délégué de l’Office de Publicité, une maison d’édition belge qui devrait publier son ouvrage, ne cachait pas ses positions pour avertir les colonisateurs sur les dangers avenir. Cette lettre datée de Janvier 1957 montrait l’impérieuse nécessité de renforcer la cohésion entre les congolais et les belges pour éviter les dérives. Cette cohésion consistait pour Lumumba d’établir une société juste et équitable où l’attitude d’un père fouettard allait se traduire à un partenariat et à une collaboration égale à égale pour permettre aux congolais et congolaises de se sentir libre afin de construire un pays plus beau qu’avant. C’est pourquoi en écrivant son ouvrage intitulé : Le Congo terre d’avenir, est-il menace ? Les buts qu’ils poursuivaient étaient[7] :

  • traduire la pensée et les aspirations des  Congolais  sur  les  différents  problèmes  d’ordre  économique,  social  et  politique  qui  leur  tiennent  particulièrement  au  cœur  et  dont  la solution que j’espère  heureuse conditionne  l’avenir  du  Congo ainsi  que  la  réussite  de  l’œuvre  coloniale  belge ;
  • éclairer les  autorités  belges  en  particulier,  et  les  coloniaux en  général,  sur  la  façon dont les Noirs du Congo envisagent leur avenir dans le monde  d’aujourd’hui  et  de  demain;
  • suggérer aux responsables de la politique africaine certaines réformes  qui  me  semblent  indispensables  si  la  Belgique  désire réellement  éviter  la  crise  et  la  perte  de  confiance  des  populations  africaines  qu’elle  administre;
  • insister sur  la  nécessité  d’harmonisation  des  rapports  sociaux entre  Belges  et  Congolais  ;

En avertissant le gouvernement belge sur les dangers futurs, Lumumba se positionne comme pacificateur. Il ne voulait pas précipiter les belges mais plutôt comme nous pouvons le constater dans le paragraphe précédent, il exhortait le gouvernement belge d’harmoniser les rapports sociaux entre les congolais et les belges. Comme l’on ne peut pas maintenir éternellement un peuple dans la domination, l’exploitation et la soumission, sa démarche consistait également à réveiller les congolais pour prendre leur destin en main. Il était temps pour que les belges comprennent que les congolais voulait une liberté. Car pour Lumumba, « il est  souhaitable  que  tous  les  milieux  belges  et  coloniaux sachent  ce  que  pensent  les

Congolais  devant  les  problèmes  posés par  la  présence  européenne  dans  leur  pays. Il faut qu’ils sachent aussi ce que veulent exactement leurs pupilles. Il est également désirable qu’ils comprennent la nécessité d’un dialogue sincère et franc entres les deux races en présence »[8]. Il s’agissait de « faire comprendre aux Belges et aux Congolais la nécessité impérieuse et urgente de réaliser, dès à présent, une entente fraternelle afin d’aboutir, par voie de conséquence, à une union définitive. Celle  union  sera  cimentée  par  l’amour  que  doivent  se  témoigner mutuellement  Congolais et  Belges »[9].

Lumumba des années 1956-1957 croit encore qu’il est possible « d’harmoniser des rapports sociaux entre Belges et Congolais », d’instaurer « un dialogue sincère et franc entre les deux races en présence» afin «d’édifier dans la concorde, une société véritablement démocratique et fraternelle dans laquelle régnera, pour toujours : l’amitié, l’amour, la paix, la justice sociale, la liberté, l’égalité des valeurs, une société qui échappera à des haines raciales »[10]. Mais l’appétit vorace et criminel des colonisateurs n’a pas permis de créer ces rapports sociaux entre les congolais et les belges, soucieux de nous maintenir dans la soumission. Ce qui provoqua par la suite les différentes résistances pour réclamer l’indépendance. La Belgique n’avait pas compris que le Congo entrait déjà dans une nouvelle histoire de libération.

2. Une incroyable lutte de Lumumba avec ses compagnons

Disons-le d’entrée, toute lutte pour bien être menée, doit suivre une quel conque idéologie. Certaines idéologies sont apprises dans les discours, dans les courants philosophiques, dans les cours enseignés à l’école, ainsi que dans la culture des lectures des ouvrages ou des articles. Lumumba aimait Padmore, Nasser, N’Krumah, ainsi que d’autres écrivains noirs. J’adorais écrit Patrice Lumumba, Aimé Césaire, Sartre, Jaures et Zola. Lumumba étudiait les révolutions réussies : Révolutions française, nassérienne, russe, l’indépendance des États-Unis, la formation du Mexique. Je me plongeais dans les révolutions marquées : Front populaire, Guerre Civile d’Espagne, l’échec de la Commune, l’époque napoléonienne, la démission d’Annibal[11]. C’est dans ce contact avec ces géants que Lumumba a su développer son idée révolutionnaire. Il a ainsi pu voir loin parce qu’il s’était jugé sur les épaules des géants comme dirait Newton.

Cependant, Lumumba n’a pas durant son parcours lutté seul, à cote de lui on pouvait voir d’autres congolais patriotes soucieux de la libération et de l’indépendance du Congo. Leur combat ne fut pas celui de conquérir le pouvoir mais le souci ardent de voir les congolaises et les congolais libérés du colonialisme, de la domination et de la soumission coloniale. Au fait, tout ce qui animait Lumumba et ses compagnons c’était : l’idée de la grandeur nationale et l’ambition de jouer un rôle historique dans l’indépendance de notre pays, Anicet Kashamura, l’un de ses compagnons fut le héraut de ce discours.  Ils sont nationalistes et parce qu’ils le sont, la politique de mobilisation nationale, de l’unité des peuples et de l’intégrité nationale demeurent leur objectif primordial pour arriver à bâtir un pays plus beau qu’avant.

Le mouvement national congolais (M.N.C/), crée par Lumumba lui-même dans les années 1958 lui permit de poursuivre son but de la libération et de l’indépendance du Congo.  Ce fut un véritable nationalisme inscrit dans cette grande perspective : « l’accession du pays à l’indépendance sans période intermédiaire et le contrôle, par les nationaux des principaux leviers de l’économie. ». Il s’agissait de bâtir, « un Congo uni et fort, véritable moteur de tout le continent africain ». Pour y arriver la mobilisation tout azimut était urgente : « les populations congolaises, sans discrimination de sexe, de tribu, de race, de région, de religion ou de croyance religieuse à se regrouper massivement autour d’eux pour poursuivre, dans la liberté retrouvée la construction du pays avec comme devise : ‘’Unité- Fraternité-solidarité’’ »[12]. Inspiré du manifeste de conscience africaine, le MNC, s’opposait par tout moyen possible à la balkanisation du territoire national, sous n’importe quel prétexte contrairement aux visions nationalistes et ethniques de l’Abako dont Joseph Kasavubu fut fondateur.

Le nationalisme de Lumumba et ses compagnons était considéré un nationalisme africain radical tandis que celui de Kasavubu,Tschombé et Kalondji est dit modéré ou fralaté.

A ce sujet Moukoko Priso écrit : « les modérés sont pour un émiettement de l’Afrique, pour transformer les mini‐pays sortis de la colonisation  en  micro‐pays  facilement  manipulables  par l’impérialisme  étranger,  maintenant  ainsi  l’Afrique  sous  la domination  et  l’oppression ;  les  chefs  du  courant  modéré  ont  un objectif qui est que chacun ait sa petite république qui est en fait une chefferie traditionnelle qu’il dirigera à sa guise avec ses amis ; et c’est au Congo que cette thèse s’exprime sans doute avec le maximum de clarté, avec le groupe de Tschombé, mais aussi ceux de Kalonji au Kasaï  et  aussi  l’Abako  de  Joseph  Kasavubu  chez  les  bakongo.  Au contraire, les nationalises africains véritables dits radicaux, sont pour la marche rapide vers le regroupement de toute l’Afrique, vers l’unité africaine réelle c’est‐à‐dire incluant l’unité politique ; ils disent que cette voie est la seule qui puisse permettre à l’Afrique de créer la force et l’espace économique qui conduiront à une marche en avant rapide pouvant satisfaire les immenses besoins légitimes des peuples africains :  c’est  la  voie  de  Lumumba  et  ses  partisans  au  sein  du Mouvement National Congolais (MNC) »[13].

Plongé dans l’idéologie nationaliste Lumumbienne, ses collaborateurs proches prenaient Lumumba jusqu’à le considérer comme‘’ Le Christ noir, le sauveur, le libérateur ‘’.

Quand Kashamura posa la question au secrétaire de Lumumba Bernard Salumu au sujet de l’entourage de Lumumba, il lui répondit, « Ayez confiance en Mwokozi, Masiyas >(Liberateur

,Messie). «Lumumba a pour mission de convertir. C’est notre Christ. II fau t savoir comprendre les pécheurs et leur pardonner»[14]. De son cote, Lumumba reconnaissait l’effort de ses compagnons. C’est par exemple quand il s’adressait à un de ses collaborateurs proches, il disait : «Voila Kashamura, avec lui, nous avons combattu depuis le début de notre carrière politique. Pour moi c’est fini. Je sens que je vais mourir. Je mourrai comme Gandhi. Si je meurs demain, c’est qu’un étranger aurait arme un Congolais. Vous tous vous allez un jour me trahir, sauf Kashamura »[15].

Comme la promesse de Jésus faite à ses disciples, Lumumba savait également qu’il allait mourir pour une cause noble. Il le ressentait au plus profond de son être mais cela ne l’a pas empêché qu’il aille jusqu’au bout de sa lutte. Ce n’était pas sa personne qui comptait mais la liberté d’un peuple et d’un pays qu’il voulait voir briller. Ce qu’il voulait voir, c’était, la libération et l’indépendance d’un peuple longtemps meurtrie et humilié par les impérialistes occidentaux. Mais une telle lutte ne pouvait qu’aboutir à la mort. C’est vers cette dimension que Lumumba voulait faire comprendre ses compagnons, jusqu’à les amener à renoncer à ses propres intérêts pour l’intérêt générale d’aucuns qualifie de sacrifice suprême. C’est qu’on peut lire dans sa dernière lettre adressée à sa femme : « Que mort, vivant ou en prison sur ordre des colonialistes, ce n’est pas ma personne qui compte. C’est le Congo, c’est notre pauvre peuple dont on a transformé l’indépendance en une cage d’où l’on nous regarde du dehors tantôt avec cette compassion bénévole, tantôt avec joie et plaisir »[16]. Et contre tout défaitisme, Lumumba poursuit, « ma foi restera inébranlable. Je sais et je sens au fond de moi-même qua tôt ou tard mon peuple se débarrassera ses ennemis intérieurs et extérieurs, qu’il se lèvera comme un seul homme pour dire non au capitalisme dégradant et honteux, et pour reprendre sa dignité sous un soleil pur »[17].

C’est cette énergie et cette foi inébranlable, qu’il convient de renouveler dans les congolais et les congolaises si nous voulons que notre pays brille dans sa profondeur. C’est dans la force de l’imaginaire que nous pouvons également basculer notre pays vers son destin. D’où la nécessité de changer notre regard à l’égard de notre pays. Aujourd’hui, en RD. Congo, « l’imaginaire est conditionné à voir le négatif et il s’y emprisonne en grossissant ce qui ne va pas, tout le négatif et tout le côté destructeur des choses. Il faut une éducation du regard pour qu’il voie le positif, qu’il décèle les potentialités créatrices   qui   peut   faire   émerger   de nouvelles possibilités d’être »[18]. D’où également la nécessité de l’éducation au langage dans notre pays. En RD. Congo, « le langage est enfermé dans l’esprit de destruction. Il ne peut donc pas créer ou construire à partir du désir du bien, seule base   d’une  résilience véritable dans une société qui a aujourd’hui  besoin de devenir autre que ce qu’elle  est,  de  libérer  en  elle  un  principe  de  renouveau  fondamental  pour  autre chose »[19]. D’où enfin l’urgence de construire ensemble les initiatives collectives selon les mots de Michel Séguier : les initiatives   qui   mettent   les   personnes   ensemble autour des enjeux concrets du destin commun. Être ensemble, travailler ensemble et avancer ensemble dans la réalisation des ambitions communes pour le bonheur communautaire…

  1. Avant le soleil de l’indépendance : Lumumba brutalisé, humilié et maltraité pour une cause juste. Quelle leçon pour la classe politique d’hier et d’aujourd’hui ?

Comme un mouton qui s’est laissé amené à l’abattoir, Lumumba fut brutalisé, torturé, étranglé, roué de coups et humilié. « Nous étions tous dans la stupéfaction, devant ce corps contrefait, déformé, laid, disgracieux, horrible, hideux et repoussant.  Nous étions restés sans voix »[20]. Ce fut la politique menée par les belges pour étouffer les réclamations et taire les vérités éternelles pour maintenir longtemps le peuple dans la barbarie coloniale. C’est ce qui arrive aux leaders qui sont prêts à sacrifier leur vie pour une cause commune et juste. C’est la pire de chose qui puisse arriver à un homme qui veut casser les barrières de la malédiction coloniale pour inventer des nouveaux mythes d’espérances. Lumumba, accepte de souffrir pour inventer, « l’homme congolais démiurge, qui se crée lui-même dans un génie inimaginable d’homme debout, d’homme foudre qui fait exploser tout ce que la colonisation avait fait de son peuple ; l’homme qui crée ses nouveaux cieux et sa nouvelle terre, en refusant toutes béquilles offertes par les Belges dans une bonne conscience sans objet. Cet homme-là devait écrire sa propre histoire par des actions de courage et de bravoure dans un pays qui serait le sien, dont il aurait construit la destinée par le travail et le savoir-faire »[21].

Dans la prison, et dans des conditions inhumaines inimaginables, Patrice Lumumba note : « Bien qu’immatriculé et assimilé aux Européens, on m’a fait coucher sur des planches et ce n’est que lors que j’ai protesté et demandé une couverture que l’on m’a donné une. Une semaine après, on m’a transféré au camp militaire ou j’ai passé un mois dans un W.C.sans douche ni couverture. Il n’y avait pas moyen de respirer .J’ai écrit au procureur du Roi que j’étais logé dans des conditions horribles. Pas de réponse. II a fallu l’intervention de mes enfants auprès du Gouverneur General, pour finalement, après des mois, me faire sortir de ce camp pour me conduire en prison, le 12 décembre 1959, dans des conditions un peu moins dures.  On a tout fait pour briser mon moral, mais je savais que dans tous les pays du monde, la liberté est idéal pour lequel de tous les temps, des hommes ont su combattre et mourir. J’ai fait le choix : celui de servir ma patrie. J’ai accepté tous les ennuis avec courage»23. C’est lorsque l’on comprend qu’il y a une cause à défendre que l’on peut accepter de subir de tels sorts.

Malheureusement tout l’effort et le sacrifice de Lumumba n’ont pas trouvé d’espace au sein de la classe politique actuelle.  Cette richesse de nationalisme a brillé à certain moment au cœur de la société congolaise pendant les premières années du règne de Mobutu. Il a animé la période faste de la philosophie de l’authenticité zaïroise des années 1970 avant de se dissoudre dans la crise sociale où Mobutu avait plongé le pays dans les années 1980. Il a vibré à nouveau un petit moment pendant le cours règne de Laurent-Désiré Kabila avant de disparaître de nouveau du paysage politique et de renaître de temps à autre comme incantation utile tout au long de la troisième République qui en a perdu le souffle, faute d’une grande ambition et d’un grand dessein national.  Pourtant, Lumumba est mort pour la libération et l’indépendance du Congo. Cette attitude digne d’une conscience élevée n’a pas non plus pénétrée la classe politique d’aujourd’hui.

Dans notre Congo d’aujourd’hui, on ne parle de liberté que de manière folklorique et incantatoire, sans y croire. La grandeur du Congo n’est plus une idée régulatrice de notre destinée, sauf dans la phraséologie verbeuse pour amuser la galerie internationale. La dignité, on est toujours prêt à la perdre dès que l’agitent quelque part des espèces sonnantes et trébuchantes, à toutes les occasions où l’on peut renier la parole donnée pour une petite parcelle de pouvoir ou un grade au sommet et dans les entrailles de l’État. Être des femmes et des hommes congolais debout pour écrire notre histoire comme l’Histoire des hommes debout, tournés vers l’avenir et déterminés à créer le pays de leurs rêves et de leurs responsabilités, il suffit d’ouvrir les yeux pour voir que tout cela n’a plus de sens et que le pays va à vau-l’eau dans son imaginaire créateur[22]. Dans notre Congo aujourd’hui, on ne parle que de l’avenir et du destin de façon aléatoire sans y prêter aucune énergie. La classe politique actuelle est caractérisée par son impuissance devant la misère devenue structurelle. Aucun politicien n’est prêt  à renoncer à ses instincts égoïstes et à sacrifier sa vie pour le sacrifice suprême dans ce grand combat : rendre le peuple congolais libre et heureux dans ce grand pays paradisiaque pour lui imprimer «des  éclats d’imaginaire,  des  éclairs  de  poétiques,  des  visions de  politique.. », selon les mots de Fanon.

Dans ces bruits des murailles écroulés, Ka Mana montre qu’, « il est triste de constater que 300 personnes réunies à la cité de l’UA dans un dialogue destiné à sortir notre nation de sa crise n’évoquent même pas le nationalisme du grand héros national pour le poser devant leurs propres yeux comme le Grand Esprit unificateur. Ils ont parlé sans son souffle tutélaire et leurs paroles ont tourné en rond, faute d’étoile du matin, faute du génie fécondateur que l’idéologie nationalisme lumumbienne pouvait représenter pour l’avenir à construire ». Il est également triste de constater qu’aucune idéologie n’a été aménagée autour de la vie sociale et politique et aucun programme d’éducation civique et patriotique pour amener le peuple à intégrer de façon responsable les grandes valeurs citoyennes à la lumière de Lumumba.

 C’est pourquoi, nous devons en toute urgence réinventer Lumumba et le prendre comme boussole pour notre orientation politique et idéologie. Il s’agit de l’enseigner à partir de la base, dans les couches sociales, dans les conférences, au sein des partis politiques, dans les discours du chef de l’État, dans les plénières, dans nos universités… C’est ce souffle dont la classe politique a besoin pour sortir notre pays de la barbarie néocoloniale, des menaces de balkanisation et de la prédation de nos ressources naturelles. C’est ce souffle dont la jeunesse a besoin pour s’engager dans la lutte continuelle pour l’avenir glorieux de notre nation. C’est cette énergie dont les congolaises et les congolais ont besoin aujourd’hui pour assurer notre destin d’un pays à des potentialités incroyables, au cœur de l’Afrique pour le bonheur du Congo et de l’Afrique.

Il est indispensable de créer un nouvel imaginaire dans les nouvelles générations en puisant dans la pensée de Lumumba le souffle pour une nouvelle conscience nationaliste au

 

sens d’une haute visée de grandeur pour chaque Congolaise et pour chaque Congolais.

(Ré)enraciner la nation  dans ce limon, (ré)enfanter l’homme congolais dans cet esprit, (ré)imaginer la destinée de notre pays dans cette utopie, agir et construire de nouvelles institutions pour sauver la nation de sa désorientation, il n’y a rien de plus beau, de plus grand et de plus splendide comme solutions du futur face à toutes les crises qui divisent et fragilisent notre pays aujourd’hui[23]. Il n’y rien de plus raisonnable aujourd’hui que de juguler les barbaries et les violences dans notre pays pour que notre peuple cultive cette terre bénie de nos ancêtres. Il n’y a rien de plus beau que de s’unir comme un seul peuple afin de travailler tous mains dans la main pour le bien être et le bonheur partagé.

4. Le 30 Juin 1960, beau soleil

C’est le 30 juin 1960, quand le Premier ministre Patrice Emery Lumumba prend la parole à la suite des discours du Roi des Belges Baudouin I et du Président de la République Joseph Kasa-Vubu que tout commence. Cette date est marquée par le discours historique de Lumumba qui inventait des nouveaux mythes pour le peuple congolais face à Kasavubu en posture d’enfant sage et  de colonisé poli. Kasavubu, « s’inscrit dans la vision d’un Congo qui accepte le cadeau belge avec humilité et reconnaissance. Il lit, en fait, une prose écrite par un Belge à l’intention des Congolais, avec la même visée que celle de Baudouin I… Il inscrit le Congo qui commençait ce jour-là dans le destin belge qui devait pourtant finir ce même jour. Il regarde son papier écrit par un Blanc et le récite tranquillement au lieu de lever la tête vers l’avenir pour voir les arbres et les fleurs du futur de son pays prendre un essor nouveau. Il rate ainsi son entrée dans l’Histoire parce qu’il ne voit pas que pour le Congo, l’Histoire commence »26.

Par contre, Lumumba avait compris que le 30 juin était l’entrée du Congo dans la grande destinée qui venait d’échapper à Kasavubu. Cette destinée tournait les yeux de tout un peuple non pas vers le passé, mais vers l’avenir. Tout le discours de Lumumba fut un discours de rupture avec le passé pour être la parole qui instaurait une grande utopie et un grand mythe : l’utopie de l’Histoire et le mythe du Congo nouveau qui entrait royalement dans cette Histoire. Il a parlé au nom de la nation congolaise et il a, ce jour-là, inventé l’homme congolais et son nationalisme propre, le nationalisme congolais[24]. Patrice Lumumba commence son discours en saluant fraternellement et amicalement ses compatriotes (Congolais et Congolaises). Il souligne que la date  du  30  juin  1960  marque  le couronnement d’une longue lutte, noble  et indispensable,  pour  mettre  fin  à  l’humiliant  esclavage imposé aux Congolais par le régime colonialiste  léopoldien  et  belge.  La  nouvelle  lutte, déclare  Lumumba,  commence  à  partir  du  30  juin  1960,  pour  conduire  le Congo vers la paix, la prospérité et la grandeur[25].

La vie et la mort de Lumumba ont pris ce sens ultime à partir du moment où il a compris que tout son être pouvait et devait devenir un don pour le Congo, terre d’avenir, selon le titre de son livre-phare. A partir de ce moment-là, son nationalisme a atteint une dimension sacrale qui sera son grand apport à notre pays. Lumumba devenait un héros qui entrait dans la sphère de la légende et prenait les traits d’une mythologie sacrificielle pour la postérité. Son nom vibrait de toutes les belles utopies du Congo à venir et resplendissait comme une étoile pour guider la route de l’indépendance. Il atteignait une dimension poétique, c’est-à-dire créatrice. En lui, dans son destin tragique et pathétique s’enfantait la terre nouvelle et se chantait le cantique nouveau des générations futures : une certaine vérité du Congo destinée à l’éternité[26].

  1. Du Nationalisme congolais au socialisme africain : Lumumba, une incontournable figure dans la trame du temps. Dans la foulée des indépendances africaines, l’influence de la lutte de Lumumba d’abord au Congo puis dans d’autres pays africains s’est fait remarquer. Au-delà d’être un simple nationaliste, Lumumba fut un véritable socialiste africain dans sa pensée pour l’avenir de l’Afrique et dans son action en collaboration avec d’autres leaders africains pour la libération et l’indépendance totale de l’Afrique. Ce nationalisme été le limon de notre indépendance dans l’esprit de Patrice Emery Lumumba durant sa vie comme à l’heure de sa mort. Son nationalisme congolais, c’est le patriotisme, la foi dans le Congo libre et l’indépendance du Congo pour que, libres d’esprit, les congolaises et les congolais travaillent pour le destin du Congo. Son socialisme consiste à promouvoir une société juste, à lutter contre les inégalités sociales en sauvegardant les valeurs sociales et culturelles africaines.

Le  nationalisme  de  Patrice  Lumumba  s’est  exprimé  à  travers  les  actions  et les objectifs suivants : « Libérer,  en  luttant  courageusement,  le  peuple  congolais  du  régime colonialiste  afin  qu’il  puisse  accéder  à  l’indépendance  réelle  et  à  la prospérité  par  le  travail) industrialisation du pays dans les domaines miniers, voire  agricoles,  développement  de  l’infrastructure  ferroviaire, aérienne,  maritime  et  fluviale/accords  de  coopération  bilatérale conclus dans le respect du principe de souveraineté et de dignité) ; Forger  l’unité  nationale  et  préserver  l’intégrité  du  territoire  congolais par l’action du M.N.C; Établir  une  véritable  justice  sociale,  notamment en matière de rémunération professionnelle (paysans, ouvriers, fonctionnaires) ; Instaurer la liberté d’expression nécessaire aux citoyens congolais pour favoriser la paix et le dialogue constructif ; Faire  participer  les  chefs  de  clans  aux  décisions de l’administration territoriale post-coloniale tout en leur confiant la  responsabilité de veiller à leur application; Développer au Congo-Léopoldville  l’enseignement  scolaire  pour  filles et  garçons  et  le  rendre  obligatoire  et  gratuit  ;  octroyer  des  bourses  d’études  aux  Congolais  doués  pour  qu’ils  puissent  étudier  et  se perfectionner  dans  les  établissements  scolaires  supérieurs  et  les universités  de  divers  pays  industrialisés  ;  éviter  des  discriminations  ethniques,  tribalistes,  sexistes,  religieuses   entre  les  citoyens  et valoriser la compétence et le dévouement pour la patrie[27].

Dans les  milieux universitaires  du  Congo-Léopoldville, l’action  politique de  Patrice

Lumumba pour son pays est qualifiée quelquefois de socialiste  : « Le  socialisme »  implicite de Lumumba luttait contre : les inégalités sociales, les discriminations colonialistes  et  raciales, le  tribalisme  et  le régionalisme,  la  bourgeoisie  locale  corrompue,  l’impérialisme  et  les puissances  financières  étrangères.  Pour  Patrice  Lumumba,  l’indépendance de  son  pays « n’aura de sens que  si  elle  contribue  à  améliorer  les conditions  de  vie  des  masses  laborieuses  et  paysannes ». Le président fondateur du MNC envisageait  le  développement  harmonieux  des coopératives  dans  les  milieux  ruraux  et  la  mécanisation  partielle  de l’agriculture. Il rêvait de transformer l’ex-Congo belge en une Communauté nationale  et  de  fonder  l’action  du  nouvel  État  congolais  sur  les  principes d’égalité,  de  solidarité  et  de  fraternité  entre  les  populations  congolaises.  Il revendiquait pour les Congolaises les mêmes possibilités de formation et les mêmes droits politiques que pour les Congolais.  Les  richesses  du  Congo, insistait-il, devaient profiter à toutes les couches populaires du pays, par une politique  de  rémunération  professionnelle  équitable  et  de  répartition équilibrée  des  revenus  entre  les  provinces.  Le  Gouvernement  Central,  tout en  maintenant  l’unité politique  et  économique  du Congo, devait  veiller  à  ce que  les  provinces  jouissent  «  d’une  certaine  autonomie  et  d’un  certain pouvoir  pour  des  matières  d’intérêt  provincial  ».  Les  divisions administratives  de  l’époque  coloniale  devaient  être  modifiées  selon  une procédure  légale  et  démocratique  afin  que  «  chaque  citoyen  trouve  le bonheur au milieu des siens »[28].

En ce qui  concerne  son  panafricanisme,  les  buts  poursuivis  par  Patrice Lumumba,  avec  d’autres  leaders  africains,  témoignaient  à  la  fois  d’un certain idéalisme et d’une grande volonté de servir l’Afrique. Il voulait : Réhabiliter et  sauvegarder les  valeurs  sociales  et  culturelles  de l’Afrique ; Arracher  les  peuples  africains  à  leur  passivité  et  les  libérer  de  leur complexe  d’infériorité  pour  qu’ils  se  sentent  revalorisés  face  aux peuples dits civilisés ; Mettre fin à  toute  domination  étrangère  et  impérialiste  en  Afrique, construire une  Afrique libre,  indépendante  et  unie  ;  pour  atteindre efficacement  cet  objectif, la libération de  l’Afrique,  Patrice Lumumba  estimait  que  les  dirigeants  politiques  africains  devaient rester  solidaires et unis. Ce Premier Ministre du Congo-Léopoldville était  persuadé  que

l’indépendance  de  son  pays  marquait  «  un  pas décisif vers la  libération  de tout  le  continent africain». Il avait projeté de soutenir des mouvements nationalistes, particulièrement en Angola, en Rhodésie et en Afrique du Sud.  Pendant  les  quelques  semaines  du fonctionnement effectif de son  gouvernement, Patrice  Lumumba avait accueilli  chaleureusement  à  Léopoldville  un  certain  nombre  de dirigeants nationalistes angolais et se préparait à leur accorder une aide matérielle régulière ; Favoriser  les  échanges  culturels,  la  communication  et  le rapprochement  entre  les  pays  africains  :  en  rendant  obligatoire l’enseignement  du  français  et  de  l’anglais  dans  toutes  les  écoles d’Afrique, en supprimant les barrières territoriales dans le sens d’une libre  circulation des Africains à  travers  tout le continent, en concluant des  accords  commerciaux  entre les  États  africains  et  en  organisant  la coopération sur le plan militaire. Assassiné  en  janvier 1961 en pleine lutte pour réaliser concrètement l’indépendance du Congo-Léopoldville, Patrice Lumumba incarne désormais l’Afrique combattante  et  trouve  sa  place  dans  le  monde  des grands Ancêtres africains, héroïques et inspirateurs[29].

C’est pourquoi, malgré les tumultes que traverse tout le continent africain, Lumumba espère contre toute espérance à l’avenir de l’Afrique pour les générations futures. Il ne cessait de le dire :  « Je  pense,  toutefois,  que,  à  long  terme,  on peut  croire  à  un meilleur avenir

 

pour  le  continent  africain :  les  peuples  africains,  si  longtemps  opprimés, dominés  et  exploités  par les puissances impérialistes en collaboration avec leurs « serviteurs locaux » commencent à prendre profondément conscience de leur  misère  croissante.  Il est difficile de prévoir ce que sera l’Afrique d’ici deux ou trois générations.  Il  y  aura  de  nombreuses  et  profondes transformations  sociopolitiques  ;  inévitablement,  d’autres  luttes  populaires s’engageront  pour la  liberté et la dignité. À mon sens, ces  luttes  populaires seront  menées  essentiellement  par  des  ouvriers,  des  paysans,  des  chômeurs et des étudiants patriotes et actifs. «  L ’Afrique  écrira  sa  propre  histoire  et  elle  sera  au  Nord  et  au  sud  du Sahara une histoire de gloire et de dignité »[30]. Et c’est en posture de grand héros et du grand leader que sa mémoire n’a pas vite quitté l’imaginaire collectif des congolais.

  1. L’inoubliable Patrice Emery Lumumba : Message musical villageois en mémoire de Patrice Lumumba Parce qu’il fut un héros qui a marqué l’histoire du Congo, la mémoire de Lumumba n’avais toute suite quitté l’imaginaire des peules congolais dans les villages voire dans certaines villes du pays. Dans les villages sous le rythme de tambour -battant on pouvait entendre ce bon chant clamant la disparition héroïque du Lumumba :

Lola (Héros) écoute, les instruments jouent pour te pleurer.

Yélééléélééé !

C’est dans un milieu étranger que le coq prend du poids.

Tu es parti mais (j’espère que) tu reviendras.

À  l’annonce  de  ta  disparition,  je  n’ai  même  pas  le  courage  de  danser  la lomamba (danse funèbre locale).

Je pleure et j’écris des lettres (pour m’informer de ta disparition). Comment te revoir ?

Faut-il parcourir en aval des rivières lointaines pour te rencontrer ?

Faut-il parcourir en aval des rivières lointaines pour te rencontrer ? Ah, ah, ah, ah !

Tu voyages sans retour !

Les pieds humains permettent de voyager mais le sol (natal) ne voyage pas, ne se déplace pas.

 

Du désespoir désespéré d’un père qui vient de nous quitter sitôt on pouvait entendre chanter :

 

La tête de la famille du chef ne devrait pas manger les feuilles de manioc.

Pourquoi ce sort pénible ?

Le père de la nation est plongé dans le sommeil « éternel », yélééléé ! Toi devant, moi derrière.

Toi dans la casserole, moi dans l’assiette.

Toi au lit, moi à la porte.

Partout où je suis, même en voyage, je ne t’oublie pas.

Je ne cesse de t’envoyer des messagers…

 

La révolution tant clamée par Lumumba n’avait pas été oubliée par les compatriotes qui reconnaissaient en lui un véritable leader :

 

On a assassiné notre défenseur, leader Lumumba, ah, ah ! Leader Lumumba, ah, ah !

Notre leader Lumumba.

Notre leader Lumumba.

Lumumba ligoté.

Lumumba enchaîné.

Lumumba descendant de Mongo.

Yééé, yééé !

Lumumba, fils de T’Olenga, est mort.

Oh, Révolution ! Que vive la Révolution ! Lumumba, je veux devenir ton ami.

Je t’attends même si tu retardes ton retour.

J’ai l’impression que mes cris d’appel ne semblent plus t’émouvoir. Tu voyages sans retour !

 

Lumumba se préoccupa peu des questions administratives. II préférait le contact avec les foules. Il aimait la foule. Au faite de sa popularité, chaque fois que l’occasion s’en présentait il établissait un contact physique direct. Il fut l’homme le plus aimé du Congo et l’homme le plus haï de l’Occident[31] . C’est cette attitude qui a fait de lui un grand leader à la hauteur des responsabilités en tant que patriote d’une conscience élevée.

II.    PROGRAMME D’ÉDUCATION AU LEADERSHIP, CIVISME ET PATRIOTISME EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO

Face à la carence manifeste des cadres bien formés, face au manque d’éducation appropriée pour les congolaises et les congolais, face au manque criard d’organisateurs de communautés susceptibles d’impulser de vraies dynamiques, il est indispensable de créer des programmes d’éducation à la base. Ces programmes appropriés pour l’éducation à la base permettront aux jeunes congolais de comprendre en fond la citoyenneté pour l’amour à la patrie. Il s’agit de les enseigner de façon intégrante pas dans la précipitation comme cela est fait aujourd’hui.  Il s’agit de forger notre propre programme national de la base jusqu’à l’université qui a comme jalon : l’idéologie nationaliste de Lumumba. Pour cela, les filières d’éducation au leadership et au développement organisationnel(FELDO) doivent être organisées dans nos universités pour former des cadres, soucieux de la patrie, contribuent à la refondation de notre État devenu « Liquide » et dirions-nous « Meurtri ». C’est pourquoi donc, ce programme aura comme objectif principal : la formation rigoureuse au leadership, au civisme et au patriotisme.

1. Approche conceptuelle : Civisme et patriotisme

Si nous définissons le civisme comme étant une vertu que doit avoir un bon citoyen, alors il une exigence morale.  « La vertu du citoyen : celle qui nous perm et d’être libres ensemble, de vivre dans une même cité, et d’en être dignes. On ne le confondra pas avec la civilité. Celle-ci n’est qu’une politesse commune, qui vaut surtout dans les rapports inter individuels.  Le  civisme  va  plus  loin: il touche à la morale  davantage qu’à la politesse, au devoir plus qu’aux bonnes  manières,  enfin  à la collectivité  davantage qu’aux individus. C’est pourquoi les deux sont nécessaires »[32].  Mais le civisme peut aller jusqu’à l’héroïsme, comme ce fut le cas de certains leaders congolais comme Lumumba, Laurent Désiré Kabila et Mamadou Ndala.

Le civisme implique donc la connaissance de ses droits comme de ses devoirs vis-àvis de la société. Le civisme met particulièrement l’accent sur le dévouement. Toutefois Heymans36 identifie le civisme au patriotisme. Il distingue à cet effet trois types de patriotisme :

Le premier s’identifie au chauvisme, le deuxième à la citoyenneté et le troisième au civisme. Le premier type de patriotisme renvoie, comme le souligne Hymans, au, «  au patriotisme des grands peuples est souvent belliqueux et conquérant ». Ce type de patriotisme souligne-t-il, dégénère parfois au chauvisme ; c’est-à-dire qu’il est la manifestation d’un rationalisme excessif, d’un amour exagéré ou d’une admiration trop excessive de la nation, du pays auquel on appartient.  Le deuxième type de patriotisme, Haymns le qualifie de « patriotisme tranquille, bon enfant sans cocarde ni panache, conservateur, commode, peu exigeant. Ce deuxième type de patriotisme s’apparente à la citoyenneté, à l’amour de la patrie tel que peut le ressentir et le manifester le citoyen.

Cette forme de patriotisme, parce qu’instinct et naturel, ne procure aucune distinction ni honneur. Il n’y a aucun mérite, en effet, à aimer sa famille, même si  le contraire est manifestement condamnable sur le plan Éthique. En tant qu’élan instinct et naturel, l’amour de son pays, ce patriotisme tranquille, du citoyen ne saurait constituer une force, il n’engendre ni action, ni verte…Pour Haymans, le patriotisme du citoyen, ce patriotisme tranquille, ne suarit constituer une force ; plongé tout entier dans ses intérets et ses habitudes, il ne saurait s’elever au-delà de ceux-ci pour fédérer toutes les énergies possibles afin d’accomplir ce qui est plus que soit, au-dessus de soi, il ne peut savoir «  qu’il est d’autres sacrifices à consentir que ceux auxquels détermine le simple et assez vilgaire souci de soi-meme et des siens, d’autres devoirs à remplir d’une autre nature, plus noble, plus impérieux que ceux dont on percoit directement profit.

Le troisième type de patriotisme que Hymans identifie au civisme est, quand à lui, quelque chose de plus que le patriotisme du citoyen. Contrairement à celui-ci qui se contente d’aimer son pays comme on aime sa famille, et qui se concentre essentiellement sur soi-même, « le civisme c’est le dévouement à la cité, à la communauté, à la nation. Le civisme ne consiste pas seulement à aimer son pays, mais à se sacrifier pour lui, à lui donner quelque de soi, à s’imposer une charge personnelle pour le bien de tous, pour l’honneur, la gloire, le bénéfice de la collectivité nationale »[33]. Brièvement, le civisme est le vrai patriotisme parce qu’il donne naissance à une unité nationale, à une personne politique et morale, une nation qui s’affirme vis-à-vis de l’étranger, à une personne politique et morale, une nation. 2. Les Filières d’éducation au leadership et au développement organisationnel

(FELDO), une nécessité aujourd’hui              Cette partie s’inspire largement des idées directrices que le philosophe Ka Mana a développées dans ouvrage, Et si la RDC s’éveille. Dans cet ouvrage, le philosophe dégage savamment un programme d’éducation politique et éthique pour notre pays dans son effondrement socio-politique, socio-éthique, socio-économique et socio-culturel.  C’est pourquoi         pour    lui,       les       filières             d’éducation     au             leadership       et         développement organisationnel(FELDO) restent une piste pour juguler ces crises.  En cette période actuelle où la RDC a besoin de construire son avenir sur des bases intellectuelles sûres et sur des fondements moraux et spirituels solides, les FELDO offriraient une éducation à l’éthique politique et à l’engagement socio-économique au service d’une autre vision de la politique et d’une autre perception de l’action du développement aujourd’hui, en rupture avec les pratiques actuelles qui corrompent et détruisent le pays[34].

Aujourd’hui, si l’on se demande s’il y a un cadre concret de formation politique des leaders congolais, la réponse est qu’il n’y en a pas. Le métier d’homme politique serait ainsi un métier qui ne demanderait aucune formation particulière, aucune préparation spéciale ni aucune compétence scientifique spécifique. Il faut casser avec cette situation qui condamne le pays à travailler, pour sa gouvernance, avec des hommes et des femmes qui n’ont qu’une maîtrise approximative des problèmes politiques et une vision politique d’amateurs. Penser sérieusement la formation politique de leaders est donc une priorité. En plus, la même exigence est de mise pour la formation du peuple congolais dans son ensemble, pour qu’il ait sur les enjeux politiques une perception éclairée, une capacité d’analyse solide et une force d’action déterminante39.

L’idée de mettre sur pieds les FELDO découle d’un constat amer écrit Ka Mana : celui de l’effondrement des valeurs d’humanité dans une société congolaise confrontée depuis son indépendance à une crise globale qui fragilise sa créativité économique, désorganise son espace politique, détruit son tissu social, corrompt ses énergies d’inventivité culturelle et compromet toutes ses chances de développement humain durable et solidaire. Cet effondrement éthique du Congo a créé une personnalité collective inquiétante. Un esprit gangrené par des pathologies chroniques dont les plus visibles sont aujourd’hui : la violence sociale, la disparition du sens du bien commun, le règne de la politique du ventre, la culture du vol et des détournements des fonds publics, la privatisation de l’état, le règne du tribalisme, la médiocrité des élites dirigeantes, la destruction de l’esprit de responsabilité communautaire et le refus de fonder l’être-ensemble sur le respect des droits humains et le souci des intérêts des générations futures[35].

Dans ce contexte global qui fait du Congo une société sans repères moraux solides ni principes collectifs de régulation sociale crédible, il n’est pas possible d’imaginer une transformation positive des esprits, des comportements et des pratiques sociales sans une éducation éthique en profondeur en vue d’une politique ambitieuse de construction d’une nouvelle société. Sans une dynamique de formation humaine qui vise à construire une société sensible aux impératifs d’une destinée commune fondée sur des normes d’un être-ensemble, d’un vivre-ensemble, d’un agir-ensemble et d’un rêver-ensemble féconds et créatifs[36]. C’est pourquoi, les FELDO permettront de mettre en place les matières spécifiques vu l’urgence qui s’impose.

Des questions nécessaires à étudier selon cet axe[37]

La FELDO articulera la formation en son sein autour de 12 grands axes d’éthique politique destinés à dégager les enjeux de la construction d’une nouvelle société congolaise et de la contribution des Congolaises et Congolais à l’invention d’une nouvelle Afrique et d’un nouvel ordre mondial. Voici ces 12 axes fondamentaux :

  • La question d’éthique politique et ses enjeux globaux aujourd’hui
  • Éthique, culture et civilisations africaines
  • Éthique, politique, économie, mondialisation et développement organisationnel
  • Éthique, science et nouvelles technologies
  • Éthique, éducation et invention du futur
  • Éthique, écologie et bioéthique
  • Éthique, religion et spiritualité
  • Éthique, développement et transformation sociale
  • Éthique, paix et non-violence  Éthique, droits humains et société
  • Éthique, identités culturelles et dialogue des civilisations
  • Éthique, politique, transformation sociale et nouvelle humanité.

 

Il s’agit enfin de compte, « d’aménager, pour l’invention du nouvel état en RDC, des espaces de formation professionnelle des cadres actifs dans l’action politique et des agents de haut niveau pour le développement communautaire. Ces espaces  se proposeraient  de  donner,  aux  générations  montantes  et aux  adultes  qui  veulent  s’engager  dans  l’action  politique pour changer la société et dans l’animation communautaire pour  le  développement,  des  bases  théoriques,  des  outils techniques  et  le  sens  éthique  des  valeurs  fondamentales pour une politique de transformation positive et profonde de la société »[38].

  1. L’éducation à la formation militaire en RD. Congo : ancrage du présent face aux menaces de la balkanisation

La défense de l’intégrité territoriale : L’État gendarme la seule issue

Travailler pour l’avènement de l’État gendarme en RD. Congo, c’est d’abord réformer notre armée et la police. Cette réforme, exige une mobilisation de la jeunesse au niveau national à intégrer l’armée. C’est en suite mobiliser les moyens nécessaires concentrés pour améliorer les conditions de vie de nos militaires. C’est enfin doter cette armée d’un arsenal militaire pour désarmer les aventuriers militaires et leurs alliés qui sèment la terreur à l’Est du pays. Il s’agit désormais de « dresser nos front longtemps courbés » comme le rappelle notre hymne nationale pour sécuriser et protéger nos frontières contre toutes ces menaces. Il s’agit également de renforcer la sécurité à l’intérieur du pays pour protéger les populations et leurs biens. Il faut préciser que, le plan de réforme de l’armée est construit autour de quatre grands axes : une force de réaction rapide, un «idéal d’excellence», la réconciliation de l’armée avec la population et une armée de «développement »[39].

Aujourd’hui suite aux recrudescences des rébellions et des agressions étrangères, les congolais et congolaises sont fort convaincus qu’il est possible d’avoir une armée capable de défendre l’intégrité nationale. Plusieurs suggestions et opinions fusent de partout suite aux nouvelles attaques du M23 soutenu par le Rwanda et qui actuellement, occupe certains villages de la partie Est du pays. Au sein de la population, certains jeunes se disent prêt à intégrer l’armée si les conditions de vie sont bien aménagées par l’État congolais. D’autres jeunes, dans des universités qui se sentent inquiéter par cette situation de guerre qui perdure dans cette partie du pays, proposent à l’État de créer nombreuses écoles militaires sur l’étendue du territoire nationale où les finalistes des universités passeront pour la formation militaire. Aux yeux de ces universitaires, quand le pays fait face à des agressions, il est facile de recourir aux jeunes pour défendre la nation. Ils sont convaincus que le nombre important des militaires aux frontières et au front est dissuasif face à l’ennemi qui tenterait d’envahir le territoire[40].  C’est sur cette base qu’il convient de penser l’État gendarme en RD. Congo comme garantie à l’intégrité nationale. Car « protéger la société contre la violence et l’invention d’autres sociétés », c’est-à-dire d’entretenir une armée et d’organiser la défense du territoire, c’est le premier rôle du souverain aux yeux d’Adam Smith46. La sécurité et la protection, c’est aussi le premier rôle assigné au Léviathan selon Thomas Hobbes. C’est à partir de l’État gendarme que le peuple qui se sent en sécurité peut créer, inventer et produire. Ce peuple libre, peut cultiver les terres, nourrir le pays, l’Afrique pour réaliser son destin de la « gâchette de l’Afrique » dont parle FANON et pourquoi pas du monde. Une fois la sécurité garantie, l’État peut alors envisager.

Crier à la balkanisation ne sert à rien quand on ne se dote pas d’une armée capable de défendre efficacement le territoire et de se faire respecter dans le monde actuel ». D’où l’urgence et la nécessité d’une armée puissante, disciplinée, dotée des moyens nécessaires de survie, de rééducation et de guerre. C1HOEBEKE, BOSHOFF et VLASSENROOT, « Monsieur le président, vous n’avez p as d’armée…» La réforme du secteur de sécurité vue du Kivu. » In Cahiers africains, n°76, 2009.p. 128.

1 Emmanuel Luvu, Inquiétante, la République Démocratique du Congo, St Ouen,  Les Editions du Net, 2022

1Nous renvoyons à l’Ouvrage de SMITH A., La richesse des nations. Traduit par Germain Garnier, Paris, Flammarion, 1999’est la raison de ce grand discours sur la guerre de Machiavel :

« Il est impossible d’organiser une armée de manière qu’on puisse compter qu’elle ne puisse être défaite. Ainsi vos hommes si sages ne doivent pas mesurer l’inutilité d’un tel système à une défaite unique ; mais ils devraient se persuader que, comme on a été battu, on peut être également vainqueur, et que l’essentiel est d’écarter les causes de la défaite. S’ils voulaient bien rechercher ces causes, ils verraient qu’elles ne proviennent pas du vice de la mesure, mais de ce qu’un tel ordre n’avait pas toute sa perfection. Et, ainsi que je l’ai dit, ils devaient y remédier, non en blâmant l’ordonnance en elle-même, mais en corrigeant ses défectuosités »[41].

Conclusion

Repenser le nationalisme de Lumumba aujourd’hui, c’est accepter des nouvelles orientations politique, culturelles et sociales. C’est accepter de prendre ce héros comme boussole et ferment pouvant permettre de changer la situation actuelle de désorganisation et d’errance politique. C’est aussi accepter de choisir la liberté des congolais et congolaises. Cette liberté, c’est de voir tous les congolais heureux sur le sol de leurs ancêtres aujourd’hui menacé encore par les occidentaux à cause de leur appétit féroce et diabolique de prédation. Le chemin que Lumumba avait tracé, c’était celui d’un Congo brillant qui assure sa grandeur à travers les gammes des ressources naturelles qu’ils regorgent. C’est la route du destin du Congo et de l’Afrique car le Congo c’est l’Afrique et l’Afrique c’est le Congo.

D’où l’urgence de réinventer cette RD. Congo de la renaissance Afrique à partir des voies déjà tracées par Lumumba depuis son combat jusqu’à l’accession de notre pays à l’indépendance. La réinvention de cette RD. Congo sera possible dans la mesure où nous acceptons cette voie : la voie de la liberté, du civisme, du patriotisme et du leadership pour basculer notre pays vers son destin. C’est par là que nous devons commencer. Mais pour y arriver nous devons mettre en place des espaces appropriés pour la formation des cadres qui puisse donner, aux  générations  montantes  et aux  adultes  qui  veulent  s’engager  dans  l’action  politique pour changer la société et dans l’animation communautaire pour  le  développement,  des  bases  théoriques,  des  outils techniques  et  le  sens  éthique  des  valeurs  fondamentales pour une politique de transformation positive et profonde de la société.

C’est dans cette perspective qu’il nous faut envisager le changement dans notre pays. Il nous faut réellement une classe dirigeante compétente imbibée de patriotisme et de civisme pour sauver notre pays face aux menaces de la balkanisation, de la prédation et assez souvent des agressions Rwandaises et ougandaises sous la bénédiction de la communauté internationale.

Face à cette menace et à la faillite de la diplomatie, il faut que notre armée monte en puissance. D’où la nécessité de l’engagement de tous les congolaises et les congolais, tous unis comme un seul peuple pour sauvegarder notre unité nationale. Cela fut la lutte de Lumumba depuis notre accession à l’indépendance jusqu’à sa mort. C’est dans la force de l’imaginaire qu’on pourra basculer notre pays vers son destin de la « gâchette de l’Afrique

Références Bibliographiques  Emmanuel Luvu, Inquiétante, la République Démocratique du Congo. Juguler les barbaries pour penser les conditions de possibilités d’une paix durable à l’Est du Congo, St Ouen, Editions du Net, 2022.

  • Ka Mana, R(é)découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute, 2016
  • José Mulenda, Le Congo-Kinshasa est un eldorado. A qui profite-il ?, Paris, Harmattan, 2010.
  • Platon, Apologie de Socrate, Trad de Luc Brisson, Paris, Flammarion, 1998.
  • Lumumba, Le Congo terre d’avenir est-il menace ? , Bruxelles, Offices des publicités, 1961.
  • Cécile Manya, Patrice Emery Lumumba. Le Sankuru et l’Afrique, LE LYS BLEU Editions, 1984.
  • Anicet Kashamura, De Lumumba aux colonel, Paris, Buchet/ Chastel, 1966, p.22
  • Programme d’action politique M.N.C / Lumumba
  • MOUKOKO PRISO, « Panafricanisme et indépendance : rôle des mouvements de libération dans le processus d’unité africaine » in Actes du colloque du cinquantenaire, Juillet 2010.
  • Lumumba, Lettre à ma très cher compagne Pauline, Prison de Thysville, 8 Janvier 1961.
  • Ka Mana(Dir), Identités traumatiques et mémoires humiliées dans la Région des Grands Lacs. Construire une culture de résilience et une communauté de destin, Goma, Pole Institute, 2017.
  • André Compte Sponville, Dictionnaire philosophique, Paris, P.U.F, 2001, p.169
  • Hymans Paul, Patriotisme et civisme, Bruxelles, A et G. 2000
  • Ka Mana, Et si la RDC s’éveille. Réflexions sur l’invention, la refondation et l’avenir de l’état en République démocratique du Congo, Goma – Yaoundé, Pole Institute & AIS éditions, 2012.
  • HOEBEKE, BOSHOFF et VLASSENROOT, « Monsieur le président, vous n’avez p as d’armée…» La réforme du secteur de sécurité vue du Kivu. » In Cahiers africains, n°76, 2009.p. 128.
  • SMITH A., La richesse des nations. Traduit par Germain Garnier, Paris, Flammarion, 1999.

 

[1] Né à Goma à l’Est du Congo, Emmanuel Luvu est chercheur et écrivain de l’Université Officielle de Bukavu. Ses recherches sont axées dans les domaines de philosophie politique et sociale, leadership et développement organisation et paix et bonne gouvernance en RDC. Lire à ce sujet son ouvrage : Inquiétante, la République Démocratique du Congo. Juguler les barbaries pour penser les conditions de possibilités d’une paix durable à l’Est du Congo,St Ouen, Edinet, 2022. benekambaluvu@gmail.com

[2] Ka Mana, R(é)découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute, 2016

[3] Ka Mana ; cité par Emmanuel Luvu, Inquiétante, la République Démocratique du Congo. Juguler les barbaries pour penser les conditions de possibilités d’une paix durable à l’Est du Congo, St Ouen, Editions du Net, 2022. 4Ka Mana, R(é) découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute, 2016

[4] José Mulenda,  Le Congo-Kinshasa est un eldorado. A qui profite-il ?, Paris, Harmattan, 2010, p.18

[5] Ka Mana, R(é) découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute, 2016

[6] Platon, Apologie de Socrate, Trad de Luc Brisson, Paris, Flammarion, 1998.  Dans cette péricope, Socrate est considéré comme taon, petit animal repoussant, désagréable pour le cheval. Il n’est pourtant pas dangereux pour lui, bien au contraire. En le piquant de temps à autre, en effet, le taon oblige le cheval à se réveiller et l’empêche de sombrer dans une léthargie complète. La pire de chose qu’il pourrait arriver à ce cheval serait de tuer ce taon impudent qui le dérange sans cesse.

[7] E. Lumumba, Le Congo terre d’avenir est-il menace ? , Bruxelles, Offices des publicités, 1961p.6-7

[8] ,Ibid p.7

[9] Ibid, p.8

[10] Cécile Manya, Patrice Emery Lumumba. Le Sankuru et l’Afrique, LE LYS BLEU Editions, 1984 p.9

[11] Anicet Kashamura, De Lumumba aux colonel, Paris, Buchet/ Chastel, 1966, p.22

[12] Programme d’action politique M.N.C / Lumumba

[13] MOUKOKO PRISO, « Panafricanisme et indépendance : rôle des mouvements de libération dans le processus d’unité africaine » in Actes du colloque du cinquantenaire, Juillet 2010, pp 45-63.

[14] Anicet Kashamura, Op.cit, p.13

[15] Lumumba, cité par Anicet Kashamura, Op.cit.p.161

[16] Lumumba, Lettre à ma très cher compagne Pauline, Prison de Thysville, 8 Janvier 1961.

[17] Ibid

[18] Ka Mana(Dir),  Identités traumatiques et mémoires humiliées dans la Région des Grands Lacs. Construire une culture de résilience et une communauté de destin, Goma, Pole Institute, 2017 p.170,

[19] Ibid

[20] Luc 10,29-37

[21] Ka Mana, R(é)découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute,  2016 23 Anicet Kashamura, Op.cit, p.16

[22] Ka Mana, R(é)découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute, 2016

[23] Ka Mana, R(é)découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute, 2016 26 Ibid

[24] Ibid

[25] Op.cit, p.23

[26] Ka Mana, R(é)découvrir la richesse du nationalisme congolais, Goma, Pole Institute, 2016

[27] Op.Cit., p.104

[28] Ibid., p.105

[29] Op.cit., p.106

[30] Patrice cité par Cécile Manya, Op.cit., p.107

[31] Anicet Kashamura, Op.cit, p.29

[32] André Compte Sponville, Dictionnaire philosophique, Paris, P.U.F, 2001, p.169 36 Hymans Paul, Patriotisme et civisme, Bruxelles, A et G. 2000.

[33] Hymans Paul, Patriotisme et civisme, Bruxelles, A et G. 2000.

[34] Ka Mana, Et si la RDC s’éveille. Réflexions sur l’invention, la refondation et l’avenir de l’état en République démocratique du Congo, Goma – Yaoundé, Pole Institute & AIS éditions, 2012, p.132 39 Ibid., p.84

[35] Ibid., p.133

[36] Ka Mana, Et si la RDC s’éveille, Op.Cit., p.133

[37] Ibid

[38] Ibid.,132

[39] HOEBEKE, BOSHOFF et VLASSENROOT, « Monsieur le président, vous n’avez p as d’armée…» La réforme du secteur de sécurité vue du Kivu. » In Cahiers africains, n°76, 2009.p. 128.

[40] Emmanuel Luvu, Inquiétante, la République Démocratique du Congo, St Ouen,  Les Editions du Net, 2022 46Nous renvoyons à l’Ouvrage de SMITH A., La richesse des nations. Traduit par Germain Garnier, Paris, Flammarion, 1999.

[41] MACHIAVEL N., cité par KÄ MANA(Dir), Identités traumatiques et mémoires humiliées dans la Région des Grands Lacs. Op.cit., p.83